La fiscalité
d’un pays est aussi révélatrice de ses valeurs sociales que peut l’être l’ADN
pour un être vivant. Ainsi aux États-Unis, un citoyen paie moins d’impôt mais
reçoit en revanche beaucoup moins de services de l’état. Au Canada et en
particulier au Québec, nous avons fait le choix social de se doter d’une
panoplie de services sociaux dont un système de santé gratuit. Le coût de ce
choix se traduit par une fiscalité plus lourde mais aussi plus sélective. Par
exemple, les œufs ne sont pas taxés, le caviar est taxé aux taux habituels de
la taxe de vente, et l’alcool fait l’objet d’une taxe spéciale en sus des taxes
de ventes habituelles.
Ces taux
variables visent deux objectifs : l’équité sociale et un effet dissuasif.
D’une part, on subventionne indirectement les aliments essentiels et d’autre
part, on taxe les aliments de luxe et encore davantage les aliments
potentiellement nocifs.
L’imposition
d’une taxe sur la malbouffe atteindrait simultanément ces deux objectifs en
plus de générer des recettes additionnelles pour l’état. À l’instar du taux
d’imposition qui augmente avec le revenu, la délinquance alimentaire serait
mise à contribution pour financer l’augmentation des coûts de la santé, ce qui
m’apparaît socialement équitable. Par ailleurs, une telle taxe spéciale
diminuerait la consommation d’aliments malsains au profit d’aliments sains. Par
exemple, si le sirop d’érable artificiel coûtait aussi cher que le naturel, ses
ventes chuteraient sûrement.
Les
économies que réalisent actuellement les citoyens moins nantis en achetant les
substituts industriels des aliments naturels ne sont qu’une illusion car elles
se repayent au centuple en coûts de santé additionnels. En effet, traiter le
cancer, le diabète et les cardiopathies coûtent beaucoup plus cher que les
prévenir grâce à une saine alimentation. Comme les soins de santé sont gratuits
au pays, ce sont tous les contribuables qui payent la note des délinquants
alimentaires. Autrement dit, vos impôts augmentent à chaque fois que votre
voisine fait ses tartes avec du shortening au lieu de beurre. En effet, le
shortening contient des gras trans, lesquels ont un effet dévastateur sur la
santé.
Une taxe
sur la malbouffe augmenterait les recettes de l’état tout en diminuant les
coûts du système d’assurance-maladie sans compter les pertes économiques
intangibles découlant de la maladie comme l’absentéisme au travail. Toutes ces
économies dégageraient les fonds nécessaires pour financer des campagnes de
sensibilisation mais aussi, et pourquoi pas, augmenter les prestations
d’assurances sociales. Ainsi les bénéficiaires auraient désormais les moyens de
s’acheter des aliments sains mais hélas plus dispendieux comme des fruits et
légumes frais. Par contre, le Mc Donald deviendrait une sortie de luxe réservée
aux gens fortunés.
Le taux
d’obésité s’accroit vertigineusement dans tous les pays occidentaux avec les
États-Unis en tête de peloton. Les coûts de la santé dans ce pays explosent
littéralement. Chaque bedaine molle d’adolescent se traduit par un infarctus rendu
à l’âge de trente ans. Hélas, notre système de santé canadien est déjà mal en
point et ne survivra pas à cette explosion quand l’onde de choc nous atteindra.
Après avoir consciencieusement payé leurs impôts toute leur vie, les rares
canadiens qui se rendront à l’âge de la retraite devront continuer de payer
mais cette fois-ci pour leur médecin et médicaments. Le statu quo n’est donc
plus une option.
Comment s’y
prendre pour taxer la malbouffe? Au lieu de taxer les aliments vendus au
détail, il serait plus simple et efficace de taxer les matières premières
malsaines qui composent généralement la malbouffe. Ainsi le mécanisme fiscal
actuel pour taxer l’alcool pourrait être adapté pour toutes les substances à
index glycémique élevé dont les sucres rapides (sucre blanc, glucose, dextrose,
etc…), les farines raffinées (pain blanc, pâtes blanches, riz blanc, ...), et
les céréales transformées (Corn Flakes, Special K, Froot Loops, …). Faute
d’interdire les gras trans, on pourrait les taxer de la même manière; idem pour
les essences artificielles et produits de conservation comme les nitrites. Donc
selon cette logique, plus un aliment contiendrait de substances toxiques, plus
il coûterait cher.
Depuis
2001, les américains pourchassent les terroristes à travers le monde. Pourtant
les pires terroristes habitent les États-Unis et ne sont nullement importunés
par la justice. Ce sont les administrateurs des sociétés agro-alimentaires qui
empoisonnent bon an mal an plusieurs dizaines de millions d’américains avec leur
malbouffe. Pendant ce temps, les accrocs de la malbouffe me traitent de
« taliban de la santé ».…
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