Sunday 6 October 2019

Le mirage du véganisme



La cause environnementale a le vent en poupe et c’est tant mieux. Il est temps d’entreprendre des actions concrètes pour l’environnement comme notamment instaurer une taxe sur le carbone qui reflète le vrai coût environnemental et revoir nos pratiques agricoles afin de cesser d’empoisonner nos terres et cours d’eau. 

Dans cette foulée, d’aucuns prétendent qu’on devrait également cesser la consommation de protéines animales. Hélas, malgré l’engouement actuel pour le véganisme, il s’agit d’une fausse bonne idée, d’où le vieil adage : l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Pour juger du bien-fondé du véganisme, il faut d’abord poser la plus fondamentale des questions:  une diète végétalienne convient-elle au métabolisme de l’être humain? Or, la réponse est la même que pour tout autre mammifère prédateur. C’est non.

Vitamine B12

Plusieurs substances essentielles à la santé du système nerveux ne se retrouvent que dans les produits animaliers et ne sont pas ou peu synthétisées par le métabolisme d’un mammifère prédateur. Il s’agit notamment de la vitamine B12. Le végan doit donc obligatoirement consommer des suppléments alimentaires de B12 pour combler les carences de son alimentation. Or, une diète qui nécessite des suppléments alimentaires est, par définition, une diète incomplète. CQFD.

Oméga-3

La diète végétalienne est également exempte de deux autres substances essentielles à la santé mentales : les acides oméga-3 dits eicosapentanoique (AEP) et docosahexaenoique (ADH). Ces deux acides gras ne doivent pas être confondus avec l’acide gras oméga-3 dit linolénique alpha (ALA) qu’on retrouve dans nombre de végétaux dont la graine de lin. Or, ces substances nécessaires au bon fonctionnement du cerveau ne se retrouvent dans aucun végétal outre quelques rares microalgues. La consommation de ces dernières est donc primordiale car une carence en ADH et AEP produit des effets désastreux[1]. En effet, une carence prénatale ou postnatale nuit notamment au développement de l’acuité visuelle et des aptitudes cognitives du nouveau-né et entraîne même des problèmes de comportement et maladies psychiatriques[2]. La consommation d’ADH et AEP est donc essentielle durant la grossesse et l’allaitement[3]. Une carence pendant l’enfance et l’adolescence augmente significativement les risques de dyslexie[4], d’autisme[5], d’hyperactivité[6], d’amnésie[7], de problèmes de langage[8], d’apprentissage[9], et de comportement[10]. De façon générale, les enfants dont l’alimentation est déficiente en ADH développent un cerveau plus petit[11] et un quotient intellectuel inférieur[12]. Avis aux gens d’affaires, politiciens et courtiers : l’ADH protège contre le stress. En revanche, sa déficience en période de stress expliquerait le comportement criminel[13]. Plusieurs études modernes suggèrent que l’ADH a un impact direct sur la santé mentale[14].
Certes, d’autres études suggèrent que le véganisme favoriserait la santé cardiovasculaire. Cependant, la santé mentale n’est-elle pas préférable à quelques années de longévité supplémentaire? Cela dit, la méthodologie des dites études est controversée, pour ne pas dire biaisée par l’agenda politique de leurs auteurs (par exemple, le groupe de référence est constitué de gens physiquement inactifs et mangeurs de malbouffe). Quoiqu’il en soit, avec la popularité grandissante du véganisme, les données cliniques s’accumulent rapidement et le temps rendra bientôt son verdict.
En définitive, une diète végane n’est viable que dans la mesure où son adepte possède de solides connaissances scientifiques dans le domaine de la nutrition et suit étroitement son bilan sanguin, ce qui ne sera jamais le cas du commun des citoyens. Donc, au mieux, il s’agit d’une diète qui convient à une minorité d’intellectuels bien vaillants. De plus, il n’est pas garanti que les suppléments de B12 d’origine synthétique remplacent en tous points la substance naturelle originale.

Cruauté animale

Outre la dimension nutritionnelle, on peut aussi légitimement questionner la moralité du véganisme. En effet, afin d’éviter aux animaux d’élevage de souffrir, la doctrine végane leur enlève la chance même de vivre. À titre de comparaison, au début de la révolution industrielle, des patrons ont souvent abusé de leurs travailleurs. Était-ce une raison pour fermer les manufactures? Non. L’état s’est plutôt attaqué au vrai problème et a légiféré de sorte à protéger les droits des employés. Alors pourquoi ne pas faire de même ici et s’attaquer aussi au vrai problème qui est la cruauté animale? À l’instar des normes du travail, l’état doit légiférer l’agriculture afin de protéger les droits des animaux. Bien sûr, la viande élevée éthiquement coûte plus cher mais une telle hausse modèrera justement l’appétit des grands carnivores. En effet, la loi du marché sera toujours plus efficace que l’éducation pour modifier le comportement des consommateurs.

Écologie

Finalement, des agronomes remettent aussi en cause les bénéfices écologiques du véganisme. Encore une fois, pourquoi ne pas s’attaquer ici au vrai problème? La technologie existe pour faire face aux défis écologiques de l’heure mais elle ne favorise pas nécessairement l’establishment industriel actuel et c’est là que le bât blesse. En effet, ce n’est pas la communauté scientifique qui dicte l’agenda environnemental de nos dirigeants politiques mais bien le puissant lobby industriel.
Le véganisme fait fausse route en préconisant la monoculture avec engrais chimiques et donc forcément l’utilisation de semences transgéniques, d’herbicides et d’insecticides qui en découle. Au contraire, il faut décentraliser et diversifier la ferme. De plus, le pâturage demeure encore la meilleure technique pour exploiter les terres infertiles et, combiné à la rotation des cultures, pour restaurer la biomasse de nos terres arables affaiblie par des décennies d'agriculture sauvage. Or, cette biomasse constitue le réservoir naturel pour séquestrer l'excédent de carbone de l’atmosphère et ainsi renverser le processus de réchauffement de la planète.

Évidemment, les industriels préfèrent continuer à nous vendre leurs semences transgéniques et leurs engrais chimiques et pesticides associés. La mode végane constitue donc pour eux une véritable bénédiction car elle accentue la dépendance de la population envers les Beyond Meat et autres agro-industriels. Aussi ne faut-il pas s'étonner que l’industrie supporte financièrement les activistes végans en quête de notoriété. C’était notamment le cas du célèbre sportif et youtubeur britannique Tim Shieff depuis 2012. Hélas, il subit désormais l’opprobre de la communauté végane parce que des raisons de santé, voire de survie l’ont contraint tout récemment à recommencer à manger des protéines animales.
  
Romain Gagnon, ing.


[1] Connor, W.E. « Importance of n-3 fatty acids in health and disease », American Journal of Clinical Nutrition, vol. 71, no 1, 2000; James, M. J. et coll. « Dietary polyunsaturated fatty acids and inflammatory mediator production », American Journal of Clinical Nutrition, vol. 71, no 1, 2000; Kremer, J. M.. « n-3 Fatty acid supplements in rheumatoid arthritis », American Journal of Clinical Nutrition, vol. 71, no 1, 2000.
[2] Fugh-Berman, A., J. M. Cott. « Dietary Supplements and Natural Products as Psychotherapeutic Agents », Psychosomatic Medicine, vol. 61, no 5,1999, p. 712-28.
[3] Matorras, R. et coll. « Longitudinal study of fatty acids in plasma and erythrocyte phospholipids during pregnancy » J Perinat Med., vol. 29, no 4, 2001, p. 293-7; Hibbeln, J. R. « Seafood consumption, the DHA content of mothers' milk and prevalence rates of postpartum depression: a cross-national, ecological analysis », J Affect Disord. vol 69, no 1-3, 2002, p. 15-29; Helland, I. B. et coll. « Similar Effects on Infants of n-3 and n-6 Fatty Acids Supplementation to Pregnant and Lactating Women » Pediatrics vol. 108, no 5, 2001.
[4] Richardson, A.J. et M.A. Ross. «Fatty acid metabolism in neurodevelopmental disorder: a new perspective on associations between attention-deficit/hyperactivity disorder, dyslexia, dyspraxia and the autistic spectrum», Prostaglandins Leukot Essential Fatty Acids, vol. 63, no 1-2, 2000.
[5] Richardson, A.J. et B.K. Puri. « The potential role of fatty acids in attention-deficit/hyperactivity disorder », Prostaglandins Leukot Essent Fatty Acids, vol. 63, no 1-2, 2000.
[6] Mitchell, E.A. et coll. «The effects of essential fatty acid supplementation by Efamol in hyperactive children », J Abnorm Child Psycho, vol. 15, no 1, 1987.
[7] Richardson, A.J. et coll. «Eicosapentaenoic acid treatment in schizophrenia associated with symptom remission, normalisation of blood fatty acids, reduced neuronal membrane phospholipid turnover and structural brain changes», Int J Clin Pract., vol. 54, no 1, 2000.
[8] Taylor, K.E. et coll. «Visual function, fatty acids and dyslexia» Prostaglandins Leukot Essent Fatty Acids, vol. 63, no 1-2, 2000.
[9] Stordy, B.J., «Dark adaptation, motor skills, docosahexaenoic acid, and dyslexia» American Journal of Clinical Nutrition, vol. 71, no 1 (suppl.), 2000, p. 323-326.
[10] Burgess, J.R. et coll. « Long-chain polyunsaturated fatty acids in children with attention-deficit hyperactivity disorder » American Journal of Clinical Nutrition, vol. 71, no 1, 2000, p. 327-330.
[11] Castellanos, F.X. et coll. «Developmental trajectories of brain volume abnormalities in children and adolescents with attention-deficit/hyperactivity disorder » JAMA, vol. 288, no 14, 2002.
[12] Mortensen, E.L. et coll. «The association between duration of breastfeeding and adult intelligence » JAMA, vol. 287, no 18, 2002.
[13] Sawazaki, S. et coll. «The effect of docosahexaenoic acid on plasma catecholamine concentrations and glucose tolerance during long-lasting psychological stress: a double-blind placebo-controlled study », J Nutr Sci Vitaminol (Tokyo), vol. 45, no 5, 1999.
[14] Hillbrand, M. et coll. « Investigating the role of lipids in mood, aggression, and schizophrenia », Psychiatric Services, vol. 48, no 7, 1997; Fugh-Berman, A. et Cott, J.M. « Dietary Supplements and Natural Products as Psychotherapeutic Agents », Psychosomatic Medicine, vol. 61, no 5, 1999.

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